19 novembre 2001.
Recroquevillée dans le coin de la pièce, mon corps tremble encore. Les larmes coulent silencieusement le long de mes joues.
Je suis jeune, trop jeune pour comprendre. Je crois avoir méritée cela, je crois que c'est de ma faute s'il agit comme ça avec moi. Pourtant, je ne suis pas une petite fille difficile ni capricieuse, je suis sage et je joue calmement, je ne réclame pas de jouets et je travaille bien à l'école. Je ne comprends pas pourquoi maman ne fais rien, d'habitude elle me défend, peut-être qu'elle a peur elle aussi.
Il fait noir, trop noir, je n'aime pas ça. La porte s'ouvre à nouveau, je ne lève pas la tête, j'ai peur. J'espère qu'il ne revient pas encore, j'ai mal. La pièce est silencieuse, je sens des bras qui m'entourent de manière rassurante. Soudain, je n'ai plus peur, maman m'a trouvée, je me sens toute faible et pourtant je me blottie contre elle. Elle me porte dans ses bras, m'emmenant jusque dans ma chambre, elle me dépose délicatement sur son lit et s'éloigne un peu de moi. Je peux distinguer son visage effrayée et attristé lorsqu'elle découvre les nombreux coups et les marques sur mon corps. Maman attrape une couverture et vient s'allonger contre moi, ses doigts caressent doucement mes cheveux bruns. Je saisie mon doudou et le serre contre moi le plus possible. Je ne parviens pas à me calmer, cela prend parfois des heures.


8 février 2015.
Désormais, je vis toujours avec mon père à Buenos Aires, il continue d'être violent et ce n'est pas tous les jours facile. Je m'occupe de tout à la maison, il passe son temps dans le canapé à me donner des ordres et à me frapper dès que l'envie lui vient. Je n'en parle jamais, pourtant je sais que c'est une erreur, je devrais le faire, je devrais même me sauver d'ici et pourtant, je ne sais pas pourquoi, je n'y arrive pas. J'espère réellement avoir la force de passer à autre chose et d'oublier un jour toute cette histoire. Le décès de ma mère quelques mois avant mon cinquième anniversaire m'a complètement bouleversé. J'étais trop petite pour comprendre et en grandissant j'ai eu beaucoup de mal à faire mon deuil. Surtout lorsque vous vous retrouvez maintenant toute seule face à un père violent.
Le seul qui soit au courant mais à qui j'ai supplié de ne rien dire n'est autre que mon ancien professeur de littérature anglaise, Julian, enfin Mr Corbray. Je n'ai jamais été aussi proche d'un enseignant et pourtant, lui il a quelque chose de différent. L'année dernière, je passais beaucoup de temps à ses côtés et cette année, je n'ai pas la chance de l'avoir à nouveau. Toutefois, cela ne nous empêche pas de nous voir, d'autant plus qu'il y a peu de temps je me suis réfugiée en pleine nuit, chez lui. Il était mon dernier recours, je ne pouvais passer la nuit chez moi après ce que mon père m'avait fait subir. Il a accepté de m'ouvrir et de me faire entrer. Nous avons même passés la nuit ensemble, j'ai dormi contre lui. Je ne sais pas ou cette relation aboutira, tout ce que je sais c'est que je me sens bien à ces côtés et qu'il me permet d'oublier mon quotidien si sombre.